Page:Pelletan - Le Monde marche.djvu/140

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Qu’est-ce qu’un fétiche ? un morceau de bois suffisamment vieilli. Qu’est-ce qu’un noble ? un lambeau suffisamment fripé de parchemin. Le temps et le temps seul constitue toute leur valeur. Avez-vous jamais remarqué au Musée du Louvre un grain de blé soigneusement gardé dans un tabernacle de cristal ? Qu’a donc fait ce grain de blé de plus que tout autre pour figurer ainsi à l’état de monument sacré au fond d’un reliquaire ? Il a reposé trois mille ans sous le pli d’une bandelette dans une nécropole d’Égypte ; il a trois mille ans de date, et par sa date il tient de Pharaon.

Nous n’irons donc pas opposer un génie de la veille à un génie de l’antiquité pour démontrer le progrès des idées, parce que dans le parallèle nous aurions le temps contre nous, c’est-à-dire le préjugé des préjugés. Nous ne chercherons pas si un philosophe ou un moraliste de notre âge a pensé plus creux que Job, comme vous dites, ou rêvé plus grand que Platon. Nous pourrions longtemps entrechoquer des noms propres les uns contre les autres sans jamais faire jaillir du choc une clarté sur la discussion.

Posons autrement la question si nous voulons la résoudre. Demandons-nous simplement si les hommes aujourd’hui ont plus d’idées, plus d’idées justes, bien entendu, et non pas creuses, que les hommes d’autrefois, et si les idées rayonnent de notre temps sur plus d’intelligences que du temps du paganisme. Accroisse-