Page:Pelletan - Le Monde marche.djvu/157

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phant, et creuser des étangs dans les nefs de ces pagodes souterraines, ou y précipiter des cataractes du haut de la montagne pour abreuver au fond du sanctuaire les troupeaux de bœufs sacrés. Toutefois, malgré ce gigantesque effort et ce prodigieux coup de main sur le granit, elle n’a pu élever cette collaboration panthéisque avec la nature jusqu’à la hauteur de l’architecture proprement dite, ni de la sculpture.

L’architecture commence à l’Égypte ; architecture sévère, monotone comme la plaine du désert, élémentaire, uniforme, réduite à une seule figure : la pyramide ; à une seule ligne : la ligne horizontale, comme si elle avait cherché de parti pris à traduire par la simplicité et l’inflexibilité du profil la pauvreté et l’immobilité de sa civilisation. La Grèce reçoit le secret de l’art architectural de la main de l’Égypte, et brise la solennelle rigueur du type égyptien pour le refondre au moule plus souple et plus riche à la fois de son génie. Elle donne au marbre, variété, grâce, élégance, harmonie ; elle invente le fronton, elle impose un rhythme à la colonne. Rome poursuit l’évolution ; elle continue le système grec, mais elle l’agrandit, mais elle le développe, mais elle apporte la voûte au monde pour sa part d’invention, et de la voûte elle tire tout un ordre de monuments nouveaux : le cirque, le palais, le pont, l’aqueduc. Le moyen âge, enfin, lance la voûte dans le ciel, son éternelle aspiration, l’aiguise en ogive, multiplie et incidente la ligne, et réalise jusqu’à nouvel ordre, par