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la femme en lutte pour ses droits

allaient jusqu’à triompher de l’instinct même de la conservation vitale. Pour les principes, même attachement ; on croyait à l’honneur et à l’occasion on lui sacrifiait sa vie : il est vrai de dire que la presque certitude d’une vie future n’était pas sans faciliter le sacrifice.

Le pouvoir dynamogène et par suite l’utilité sociale de pareilles conceptions ne sont pas à nier ; mais elles avaient le vice rédhibitoire d’immobiliser les esprits. On pouvait mourir, mais on ne discutait pas, aussi bien l’adhésion passive sanctionnait-elle tout autant les intérêts de petites coteries égoïstes et avisées que le véritable bien général. C’est ainsi que fut acceptée et subie l’exploitation du noble par le manant, du prêtre par le fidèle, de l’homme par la femme.

Mais l’aptitude à réfléchir se généralisant, les fétiches humains comme les idoles spéculatives tombèrent en poussière. Avec les dieux s’évanouirent les rois ; devant l’honneur, le désintéressement, le devoir, l’amour-propre même, la pensée s’arrêta sceptique, et l’individu resté seul, mais sans entraves, comprit qu’il n’y avait au monde qu’une certitude, la vie présente qu’il s’agissait de conserver, et dans les meilleures conditions possibles.

L’homme avait précipité son Dieu du ciel,