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Le symbolisme n’est sans doute qu’une phase, plus ou moins durable, dans l’histoire de la poésie. A-t-il achevé son œuvre ? Nul ne saurait le dire. En tout cas, nous lui devons beaucoup. D’abord, il a rompu avec le réalisme et le mécanisme parnassiens, qui sacrifiaient le poète à l’artiste, qui eussent fini par ne laisser dans l’art aucune substance. Ensuite, il a dégagé la versification de règles artificielles. N’en concluons pas que, désormais, on écrira toujours en vers libres ; peut-être même les vers libres seront-ils bientôt abandonnés[1]. Mais nos poètes ne s’astreindront plus à une prosodie uniforme et souvent tyrannique. Si, dans tel genre, ils observeront la métrique du Parnasse, ils ne se croiront pas, dans tel autre, tenus de rimer richement et de marteler leur rythme ; ils n’appliqueront pas à l’élégie les formes de la poésie oratoire ou pittoresque. Chacun d’eux mettra sa métrique en harmonie avec sa sensibilité propre, et rien n’empêchera le même d’être, suivant l’inspiration du moment, tantôt parnassien, tantôt symboliste.

  1. Plusieurs « vers-libristes » de la première heure sont déjà venus à résipiscence, M. de Régnier, par exemple, et M. Jean Moréas.