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LIVRE IV, § XI.

ment selon l’ordre, mais en outre selon la justice[1], et comme si elles étaient disposées par un être qui les distribuerait d’après leur mérite. Continue donc à le reconnaître[2] ainsi que tu as commencé à le comprendre ; et quoi que tu fasses, fais-le toujours avec cette pensée, la pensée unique d’être homme de bien dans toute l’étendue de ce mot[3], tel que le conçoit la raison. C’est là une résolution que tu dois conserver avec toute l’énergie dont tu peux être capable.

XI

Ne prends jamais les choses sous le point de vue où les voit celui qui t’insulte, ni au point de

  1. Mais, en outre, selon la justice. C’est un axiome absolument incontestable en le prenant dans toute sa généralité ; mais la difficulté est de bien comprendre comment la justice s’applique dans les cas particuliers.
  2. Continue donc à le reconnaître. C’est comme une profession de foi d’optimisme.
  3. Dans toute l’étendue de ce mot. On peut dire de ce précepte comme l’Évangile le dit d’un autre : « C’est là toute la loi et les prophètes. » Saint Matthieu, ch. VII, verset 12. — Bossuet a dit : « La règle de la raison, c’est Dieu même ; et lorsque la raison humaine compose ses mouvements selon la volonté de son Dieu, de là résulte ce juste tempérament, de là cette médiocrité raisonnable qui fait toute la beauté de nos âmes. » Sermon sur la Loi de Dieu. Et dans le même sermon : « La volonté divine, qui préside à cet univers, étant elle-même sa règle, elle est par conséquent la règle infaillible de toutes les choses du monde, et la loi immuable par laquelle elles sont gouvernées. »