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LIVRE VI, § XVI.

a-t-il donc au monde qui mérite notre estime ? Est-ce d’être loué et applaudi[1] ? Pas du tout. Par conséquent, les acclamations et les cris d’enthousiasme[2] n’ont guère plus de prix ; et les félicitations de la foule ne sont qu’un vain tapage de voix. Ainsi, tu ferais bien de laisser là cette prétendue gloire. Que reste-t-il donc qui soit digne de ton estime ? Je te le dis : c’est, à mon sens, d’agir suivant l’organisation qu’on a[3] et de tendre sans cesse au but que les études les plus attentives et la science nous indiquent. La science[4] en effet ne s’applique tout entière qu’à ce point unique, de faire en sorte que le moyen employé par nous s’adapte le plus convenablement possible à l’objet pour lequel il est préparé. Le vigneron n’a pas d’autres vues dans les soins qu’il donne à la vigne, tout comme le palefrenier en dressant les chevaux, le veneur en instruisant les chiens, de même aussi que les précepteurs et les maîtres[5] en donnant des leçons aux enfants. Voilà

    Aurèle l’eût recueillie.

  1. Est-ce d’être loué et applaudi ? Un empereur sait mieux que personne ce que valent les louanges du vulgaire et la gloire humaine.
  2. Les acclamations, les cris d’enthousiasme. Comme ceux que les empereurs pouvaient entendre au Colisée ou au Grand Cirque.
  3. L’organisation qu’on a. Voir plus haut, liv. V, § 16, et plus loin, liv. VII, § 55.
  4. La science. Le texte dit précisément : L’art.
  5. Les précepteurs et les maîtres.