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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

traire à la constitution naturelle de l’homme[1], de ne jamais rien faire autrement que ne le veut cette constitution, ni, si elle ne le veut point, au moment où je le fais.

XXI

Tu es bien près de tout oublier ; et tout est bien près de te rendre un égal oubli[2].

XXII

C’est une vertu propre de l’homme[3] d’aimer ceux mêmes qui nous offensent. Tu ressentiras cette facile indulgence, si tu te rappelles que ces hommes sont de ta famille ; que c’est par ignorance et sans le vouloir qu’ils commettent ces

  1. Rien qui soit contraire à la constitution naturelle de l’homme. C’est, en d’autres termes, la formule stoïcienne : « Vivre selon la nature et toujours obéir à ses ordres, suivant les circonstances. »
  2. De te rendre un égal oubli. Ceci n’est pas très-juste, si, d’ailleurs, c’est très-modeste. Le souvenir de Marc-Aurèle vit encore parmi les hommes, comme cette traduction même suffit à l’attester, et il y vivra tant que le genre humain sentira ce que valent la sagesse et la grandeur d’âme. L’oubli, sans doute, atteint bien des choses, qui ne méritent pas mieux ; mais il n’atteint pas tout, et il y a de nobles mémoires que le temps respecte et consacre.
  3. C’est une vertu propre de l’homme. Cette admirable pensée marque un bien grand progrès dans les mœurs de l’an-