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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

atomes, c’est-à-dire des indivisibles. En un mot, Dieu existe, et dès lors tout est bien[1]. Si tout va au hasard, toi du moins tu n’y es pas soumis[2]. Bientôt la terre nous aura tous cachés dans son sein ; puis, elle-même changera comme nous ; ce qui succédera changera encore à l’infini, et ce changement sera éternel[3]. Aussi, en considérant ces flots accumulés de révolutions et la rapidité de ces vicissitudes incessantes, on se sentira pris, pour tout ce qui est mortel[4], d’un bien profond dédain.

XXIX

La cause universelle est un torrent qui entraîne toutes choses. Aussi, qu’ils sont naïfs même ces

    sa bonté.

  1. Dès lors tout est bien. Il faut ajouter quelque chose à cette idée, à savoir que notre raison doit croire que tout est bien, quoique souvent notre sensibilité ou notre orgueil se révolte.
  2. Toi du moins tu n’y es pas soumis. C’est la grandeur indéfectible de l’âme humaine ; et le Stoïcisme l’a senti aussi profondément que possible. Le libre arbitre fait de l’homme un être absolument à part. Entre lui et l’animal, l’hiatus est infranchissable, comme le dit Cuvier. Voir plus haut, liv. II, § 11, l’affirmation énergique du libre arbitre.
  3. Ce changement sera éternel. Il y a donc du nouveau dans le monde, puisque tout y change sans cesse. Voir le début de ce paragraphe.
  4. Pour tout ce qui est mortel. Cette restriction est nécessaire ; mais les choses de ce monde, si elles sont variables, portent en elles des principes qui ne le sont pas.