Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Barthélemy-Saint-Hilaire.djvu/429

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
407
LIVRE XI, § X.

çois. C’est déserter également le devoir[1] que d’avoir peur, dans un cas ; et, dans l’autre cas, de prendre en aversion quelqu’un dont la nature même a fait notre parent et notre ami[2].

X

La nature ne peut jamais être inférieure à l’art, puisque les arts ne sont qu’une imitation de la nature, sous ses formes diverses. S’il en est ainsi, la nature, qui est la plus parfaite[3] et la plus compréhensive de toutes, ne peut pas être au-dessous des chefs-d’œuvre de l’art les plus accomplis. Or tous les arts, sans exception, font toujours ce qui est moins bon en vue de ce qui est meilleur, et la commune nature[4] n’agit pas autrement. C’est de la nature que découle la justice ; et c’est de la justice que découlent toutes les autres vertus ; car nous ne nous soucierons pas assez de la justice si nous recherchons avec tant de passion les

  1. C’est déserter également le devoir. Voir plus haut, liv. X, § 25.
  2. Notre parent et notre ami. Doctrine essentiellement stoïcienne.
  3. La nature, qui est la plus parfaite. C’est la Providence et Dieu ; c’est l’ordre universel des choses.
  4. La commune nature. Autre forme de la même idée. La commune nature, c’est le monde avec les merveilles de tout genre qu’il offre à