Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Barthélemy-Saint-Hilaire.djvu/56

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
34
PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

vers lequel on dirige tout son effort et même aussi son imagination.

VIII

Il ne serait pas aisé de trouver un homme devenu malheureux parce qu’il n’aurait pas surveillé ce qui se passe dans l’âme d’un autre[1] ; mais quand on néglige d’observer attentivement les émotions propres de son âme, il est inévitable qu’on tombe dans le malheur[2].

IX

Que ta mémoire se rappelle sans cesse les questions que voici : « Quelle est la nature de l’ensemble des choses[3] ? Quelle est ma propre nature ?

  1. L’âme d’un autre. Cette réflexion fait suite à la fin de la précédente et la complète. Ce qui se passe dans l’âme des autres, même quand ces autres nous sont chers, ne nous touche qu’indirectement, et n’a, sur nous, qu’une influence relative ; au contraire, ce qui se passe dans notre âme a la plus haute importance pour nous ; et nous n’y regardons presque jamais. C’est à peine si l’on y songe quand la vie est près de s’éteindre.
  2. Dans le malheur. Il faut comprendre ce mot dans un sens plus large que le sens ordinaire. C’est surtout le mal que le sage veut éviter ; et Marc-Aurèle ne semble pas avoir jamais été très-préoccupé de l’idée du bonheur. C’est la vertu seule qu’il a recherchée.
  3. La nature de l’ensemble des choses. C’est en effet une