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Page:Pere De Smet.djvu/277

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Gare à vous, si le poids de votre corps, ou quelque mauvais pas, vous entraîne ! Je parle d’expérience : maintes fois, je me relevai à vingt ou trente pas de mon point de départ. Heureux si, dans sa chute, on ne se brise pas la tête contre quelque gros arbre.

» Au pied de la montagne, un nouvel obstacle se présenta. Les barrières de neige, les nombreuses digues qui, jusqu’alors, avaient arrêté les eaux des torrents, des lacs, des ruisseaux, s’étaient brisées pendant la nuit, et avaient fait croître de plusieurs pieds la grande Rivière du Portage.

» Dans une étroite vallée, qui n’a guère qu’un mille de largeur, cette rivière fait tant de détours, qu’en un jour et demi, nous la dûmes traverser plus de quarante fois, ayant de l’eau jusqu’aux épaules. Telle est son impétuosité, qu’on a besoin de se soutenir mutuellement pour ne pas être emporté par le courant. Tout le reste du trajet, nous restâmes avec nos habits trempés. Le froid, joint à mon extrême fatigue, enfla mes jambes. Les ongles de mes pieds se détachaient ; le sang se coagulait dans mes chaussures. Quatre fois, je me sentis à bout de forces. J’aurais péri dans cet affreux désert, si je n’avais été soutenu par le bras vigoureux de mes compagnons.

» Nous quittâmes la vallée du Portage pour entrer dans une forêt épaisse et montagneuse, où le sol était jonché d’arbres abattus par la tempête. Ensuite vinrent des marais, que nous dûmes traverser, ayant de la vase jusqu’aux genoux. Mais ces difficultés étaient légères, comparées à celles que nous avions rencontrées précédemment.

» Enfin, nous arrivâmes au campement des Berges, sur les bords du Columbia. Ceux qui ont traversé les