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la guerre des boutons


Il songea que, le jour où sa mère les découvrirait, il recevrait sûrement la pile et subirait l’engueulade et peut-être la claustration à la chambre et au lit.

Cette dernière considération lui fit aussitôt prendre une résolution énergique.

– As-tu des allumettes ? demanda-t-il à Touegueule.

– Oui, fit l’autre, pourquoi ?

– Donne-m’en une, reprit l’Aztec.

Et, ayant frotté le phosphore contre une pierre, après avoir réuni en une sorte de petit bûcher expiatoire la blouse et la chemise, témoins de sa défaite et de sa honte et sujets d’inquiétude pour l’avenir, il y mit le feu sans hésitations afin d’effacer à tout jamais le souvenir de ce jour néfaste et maudit.

– Je m’arrangerai pour ne pas avoir besoin de changer de pantalon, répondit-il à l’interrogation de Touegueule. Et jamais ma mère n’aura l’idée de croire qu’il est foutu. Elle pensera plutôt qu’il traîne quelque part, derrière un meuble, avec ma blouse et ma chemise.

Ainsi tranquilles tous deux et rassurés, l’énigme cruelle étant déchiffrée et le chenilleux problème résolu, ils attendirent le premier coup de l’angelus pour se mêler aux camarades sortant de la prière qui furent tout surpris de les rencontrer en tenue et ils rentrèrent chez eux comme s’ils en étaient venus eux aussi.