Page:Pergaud - La Guerre des boutons, 1912.djvu/270

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commençaient à s’agiter et les pieds se trémoussaient et les torses se tortillaient. C’était l’heure des pommes et du vin.

— On boira chacun à son tour dans la petite casserole, proposa Camus.

Mais La Crique, dédaigneusement, répliqua :

— Pas du tout ! Chacun aura son verre ! Une telle affirmation bouleversa les convives.

— Des verres ! T’as des verres ? Chacun son verre ! T’es pas fou, La Crique ! Comment ça ?

— Ah ! ah ! ricana le compère. Voilà ce que c’est que d’être malin ! Et ces pommes pour qui que vous les prenez ?

Personne ne voyait où La Crique en voulait venir.

— Tas de gourdes ! reprit-il, sans respect pour la société, prenez vos couteaux et faites comme moi.

Ce disant, l’inventeur, l’eustache à la main, creusa immédiatement dans les chairs rebondies d’une belle pomme rouge un trou qu’il évida avec soin, transformant en coupe originale le beau fruit qu’il avait entaillé.

— C’est vrai tout de même : sacré La Crique ! C’est épatant ! s’exclama Lebrac.

Et immédiatement il fit faire la distribution des pommes. Chacun se mit à la taille de son gobelet, tandis que La Crique, loquace et triomphant, expliquait :

– Quand j’allais aux champs et que j’avais soif,