Page:Pergaud - La Guerre des boutons, 1912.djvu/94

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
94
la guerre des boutons


Qu’est-ce que ça pouvait bien vouloir dire ? Non, ça ne disait rien à Camus ; alors le souffleur fronça le nez, ouvrit la bouche en serrant les dents, la langue sur les lèvres, et une syllabe parvint aux oreilles du naufragé :

— Iste !

Il ne pigeait pas davantage et tendait de plus en plus le cou du côté de La Crique, tant et tant que le père Simon, intrigué de cet air idiot que prenait l’interrogé, fixant obstinément le même point de la salle, eut l’idée saugrenue, bizarre et stupide de se retourner brusquement. Ce fut un demi-malheur, car il surprit la grimace de La Crique et l’interpréta fort mal, en déduisant que le garnement se livrait derrière son dos à une mimique simiesque dont le but était de faire rire les camarades aux dépens de leur maître.

Aussi lui bombarda-t-il aussitôt cette phrase vengeresse :

— La Crique, vous me ferez pour demain matin le verbe « faire le singe » et vous aurez soin au futur et au conditionnel de mettre « je ne ferai plus » et « je ne ferais plus le singe » au lieu de « je ferai ». C’est compris ?

Il se trouva dans la salle un imbécile pour rire de la punition : Bacaillé, le boiteux, et cet acte stupide de mauvaise camaraderie eut pour conséquence immédiate de mettre en colère le maître