Page:Pernette du Guillet - Rymes, Tournes, 1545.djvu/55

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

C’est un grand mal, qu’ardente affection
Sans esperer de son mal allegeance :
Mais c’est grand bien, quand a sa passion
Un doulx languir sert d’honneste vengeance.


Non que je vueille oster la liberté
A qui est né pour estre sur moy maistre :
Non que je vueille abuser de fierté,
Qui a luy humble, & a tous devrois estre :
Non que je vueille a dextre, & a fenestre
Le gouverner, & faire a mon plaisir :
Mais je voudrois pour noz deux cueurs repaistre,
Que son vouloir fust joinct a mon desir.


Point ne se fault sur Amour excuser,
Comme croyant qu’il ait forme, & substance
Pour nous pouvoir contraindre, & amuser,
Voire forcer a son obeissance :
Mais accuser nostre folle plaisance
Pouvons nous bien, & a la vérité,
Par qui un cueur plein de legereté
Se laisse vaincre, ou a gaing, ou a perte,
Esperant plus, que n’aura merité
Son amytié de raison moins experte.