Page:Pernette du Guillet - Rymes, Tournes, 1545.djvu/73

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Comment, ô Dieux, ces beste tant terribles
Peuvent, disois je, icy vivre en silence ?
Choses de croire a moy trop impossibles.
Car elles sont aptes a violence,
Et a les veoir ennemyes de paix
Les jugeriez par leur impatience.
Ainsi long temps d’envie je me pais,
Et de desir d’entendre un peu leur estre,
Dont a present, pour un peu, je me tais.
Car je voy là venir a main fenestre
Une grand Dame, a qui font reverence
Maint Laboureur, Noble, Marchant & Prebstre.
Car elle estoit de si belle apparence,
Que, pour pouvoir a elle parvenir,
L’un ne faisoit a l’autre difference.
Mais bien voyou de tous costez venir
Un si grand peuple, & gentz a si grand nombre,
Que de leurs noms ne me puis souvenir.
Et tant estoient, qu’ilz se faisoient encombre
Pour celle Dame attoucher, & puis suyvre,
Comme captifz, & joyeux de son umbre.
Plus la suyvoient, plus la vouloient pour suyvre,
Son seul regard si fort les delectoit,
Qu’ilz ne pouvoient, sans elle, une heure vivre.
Une grand Royne a son costé estoit