Page:Pernette du Guillet - Rymes, Tournes, 1545.djvu/84

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La contrainct estre en voulenté tres rude,
Comme confite en toute ingratitude :
Mais elle fainct, contre le sien vouloir,
D’avoir d’amour un constant nonchalloir :
Car son desir, & la crainte d’injure
Vainct ton servir, qui a t’aymer l’adjure.
Parquoy ces partz, qui en toy sont amables
D’honnesteté, se font desraisonnables.
Et son amour tres saige contredict
A ton vouloir de raison interdict.
Son sens aigu, son meur entendement
Congnoit assez valeur apertement,
Et qui l’incite, & jour & nuict convie
A te vouloir bien, & heureuse vie,
Et s’il n’estoit honte, qui la revocque,
Elle useroit d’une amour reciproque,
Mais quoy ? Raison à sus elle pouvoir,
La destournant de faire son debvoir,
Et la retient a non te satisfaire
Combien qu’elle eust voulenté de ce faire.
Ainsi tu peulx en ton ardeur choisir
Et joye, & dueil, plaisir, & desplaisir,
Doulx, & amer, faveur, & desfaveur,
Desapetit, revoquee faveur,
Donc, ô Amant, prens en toy reconfort,