Page:Persky - Tolstoï intime.djvu/154

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cela de la façon la plus inattendue. Désireux de savoir comment se divertissaient les ouvriers moscovites, je m’étais rendu le jour du Mardi-Gras à Diévitché-Polié où une fête populaire avait lieu. Je m’ennuyai copieusement pendant une heure. Déjà je me disposais à rentrer, lorsque j’aperçus Tolstoï. Je vous le répète : c’était la première fois que je le voyais. Et pourtant, je n’eus pas un instant d’hésitation. Son portrait était gravé dans ma mémoire : je le reconnus dans la foule, aussi facilement qu’un ami de vingt ans. Il était coiffé d’un vaste chapeau de feutre et vêtu d’une blouse neuve qui lui donnait l’apparence d’un bon moujik endimanché venu à la ville pour se divertir à peu de frais. Sa belle barbe de patriarche s’étalait superbement sur sa poitrine, comme la première neige de l’automne sur le versant d’une montagne. Ignoré de la foule à laquelle il se mêlait, Tolstoï s’avançait d’un pas lent, en regardant d’un œil amusé les bruyantes réjouissances populaires. Tout de suite, je