Page:Pert - La Petite Cady.djvu/100

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Ce fut, dès lors, entre eux, une affectation de naturel, de détachement, dont ils mesuraient exactement l’hypocrisie, sans pouvoir l’avouer, car ce mensonge était toute leur attitude en une situation qu’ils feignaient d’apprécier très ordinaire.

Cady s’était assise sur un tabouret, ramenant sur elle les plis de la gaze transparente ; et le jeune homme, ayant pris des épingles, disposa adroitement la chevelure épaisse de l’enfant en réservant de longues mèches qu’il releva parmi les pendeloques fixées avec solidité.

— Là ! fit-il gaiement. Voilà Cady à la dernière mode de Memphis !…

Elle se dressa, le corps raidi, sous la gaze flottante.

— Ma robe ne tient pas non plus, déclara-t-elle avec une moue, la paupière baissée, bridant l’œil et voilant à demi le regard sous les cils sombres.

Le peintre haussa les épaules.

— Parbleu !… Tu as oublié de mettre la ceinture.

Il alla chercher le bijou, et, les mains adroites et discrètes, il encercla les reins de la fillette sur la transparence de la tunique, dont il étira soigneusement les plis.

— Tu vois, expliquait-il, ces deux longs pans partant des épaules, ce sont des espèces de manches volantes, dont les danseuses saisissaient les extrémités et qui servaient à leurs attitudes, selon le pas de danse et le rythme de la musique.

En souriant, Cady prit la pose indiquée sur le tableau et, renversée, les reins cambrés, la sveltesse élégante de ses jambes et de ses cuisses dessinant un mouvement, elle érigea une exquise silhouette d’ardente petite danseuse antique…

Durant un instant, Jacques demeura émerveillé devant cette précieuse statuette, avec, au cerveau, cette flamme chaste et enthousiaste de l’artiste, chez lequel la beauté et même la sexualité n’évoquent plus la sensualité, mais uniquement une émotion