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[1203] de la conqueste

[An 1203] Cependant l’armée françoise, sejourna tout cét hyver à Zara contre le roy de Hongrie. Durant lequel temps les esprits des Croisez ne furent pas pour cela en paix, aucuns se travaillans pour faire rompre le camp, les autres faisans leur possible pour le tenir ensemble. Dans toutes ces divisions, il y en eut plusieurs de moindre condition qui se derobérent et s’embarquérent dans des navires de marchands, et mesmes il y en eut bien cinq cens qui se mirent en un seul vaisseau qui coula à fonds, et furent tous noyez et perdus. Une autre trouppe, ayant pris son chemin par terre, pensoit se sauver par l’Esclavonie ; mais les paysans lui ayant couru sus, elle fut presque toute devalisée ou mise à mort ; le reste qui se peut sauver prit la fuitte et regagna le camp. Et ainsi l’armée alloit tous les jours en diminuant.

51. D’autre part, un grand seigneur d’Allemagne, appellé Garnier de Borlande, s’embarqua dans un navire marchand et laissa l’armée, dont il fut fort blâmé. Peu aprés, un autre grand baron de France, nommé Regnaud de Montmirail, fit tant par l’entremise du comte de Blois, qu’il fut deputé et envoyé en ambassade en Syrie sur l’un des vaisseaux de la flotte, ayant juré et promis sur les saincts Evangiles que, quinze jours aprés que lui et les chevaliers qui l’accompagnoient seroient arrivez, et auroient achevé leurs affaires, ils se rembarqueroient pour retourner au camp. Et sur cette promesse il en partit, et avec luy Henry de Castel son neveu, Guillaume vidame de Chartres, Geoffroy de Beaumont, Jean de Froieville, Pierre son frere, et plusieurs autres. Ils tinrent néant-