Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 1re série, tome 1.djvu/344

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
326
[1204] de la conqueste

portée de la prise de Constantinople, et comme son mary avoit esté esleu empereur, au contentement de toute la chrestienté. Mais, comme elle faisoit ses preparatifs pour l’aller trouver, elle fut surprise d’une maladie dont elle mourut ; ce qui convertit cette precedente joye en tristesse, estant une tres-bonne et vertueuse dame, et aymée d’un chacun. Ceux que nous avons dit estre arrivez de la Terre Saincte en apportérent la nouvelle à l’Empereur, qui en eut un extréme dueil et regret, comme aussi tous les barons de l’Empire, qui souhaittoient avec passion de l’avoir pour princesse.

170. En ces mesmes jours ceux qui estoient allez à la ville de Piga, dont Pierre de Braiecuel et Payen d’Orleans estoient capitaines, fortifiérent un chasteau appellé Palorme[1], et, aprés y avoir laissé garnison de leurs gens, passérent outre pour faire de nouvelles conquestes. Cependant Theodore Lascaris ayant ramassé ce qu’il pût avoir de trouppes, ils se rencontrérent en une plaine qui est au dessous du chasteau de Poemaninum[2], le jour de Sainct Nicolas d’hyver, où les nostres eurent fort à faire, veu le grand nombre des ennemis, et le peu de gens qu’ils avoient, n’ayans pas en tout plus de sept vingt chevaliers, sans les chevaux-legers : toutesfois, à l’ayde de nostre Seigneur, qui dispose des choses par des rencontres et des evenemens inopinez, comme il luy plaist, les François defirent les Grecs qui y receurent une grande perte : en sorte qu’en dedans la semaine la plus grande partie

  1. Palorme : Cette ville étoit voisine de Lopadium, près des ruines de l’ancienne Cyzique.
  2. Poemaninum : ville de la province de l’Hellespont, voisine de Cyzique.