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TABLEAU

des baillis de ses domaines, il faisoit tenir auprès de lui une cour de justice qu’on appeloit les Plaids de la porte. C’étoit là qu’il recevoit l’appel des causes de ses vassaux jugées en première instance par ses officiers. On le voyoit en été rendre ainsi lui-même la justice, soit dans le jardin de son palais, situé dans l’emplacement où se trouve aujourd’hui la place Dauphine, soit sous les arbres du bois de Vincennes : tableau touchant de nos antiques mœurs, dont la poésie et l’éloquence se sont emparé, pour en proposer l’exemple aux siècles modernes, sans réfléchir que c’étoit à titre de seigneur féodal que Louis jugeoit ses sujets, et que la constitution des monarchies actuelles, entièrement différente, rend plus ou moins, dans toute l’Europe, la justice indépendante du pouvoir suprême.

Louis ne négligea rien pour préparer ce résultat, qui constitue la véritable liberté des peuples. Suivant l’usage, ses vassaux immédiats composoient sa cour de justice. Profitant de leur inexactitude, et de leur dégoût pour les affaires, il les remplaçoit par des hommes de loi. Ces hommes, distingués par leur science et leur mérite, furent par la suite les seuls juges ; et c’est là l’origine de nos parlemens, qui sous les règnes suivans, devinrent indépendans et sédentaires.

Son amour pour la justice se montra surtout dans une affaire où Charles d’Anjou, son frère, étoit intéressé. Ce prince, dont le caractère violent se développera bientôt, à la suite d’un différend avec un simple chevalier, avoit fait mettre en prison son adversaire, qui sollicita la protection du Roi. Louis témoigna son indignation à Charles. « Croyez-vous,