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DU RÈGNE DE SAINT LOUIS

heure étoit venue, et ne négligea aucun soin de la royauté. Il oublioit ses maux, pour soulager ceux des autres. Philippe, son fils aîné, encore malade et tourmenté d’une fièvre-quarte, ne le quitta plus, depuis le moment où il fut obligé de garder le lit ; et ce fut alors que Louis traça, pour son successeur, cette belle instruction sur les devoirs des rois, qui se trouve dans Joinville.

Le danger devenant pressant, on lui apporta le viatique. Malgré sa foiblesse, il descendit de son lit et le reçut à genoux. Dans ce moment, on lui entendit souvent répéter ces mots : Fac nos, Domine, prospera mundi despicere, et nulla ejus adversa formidare… Esto, Domine, plebi tuæ sanctificator et custos. Il pensoit surtout aux dangers que couroit son armée : « Dieu, disoit-il, ayez pitié de ce peuple qui m’a suivi sur ce rivage, conduisez-le dans sa patrie, faites qu’il ne tombe pas entre les mains de vos ennemis, et qu’il ne soit pas contraint à renier votre saint nom. » Le jour qui précéda sa mort, ne pouvant plus parler que très-bas, il disoit à ceux qui prètoient l’oreille : « Pour Dieu, cherchons comment il seroit possible de faire prêcher la foi à Tunis ! Qui pourroit-on y envoyer ? » Dans ses courts instans de délire, il répétoit : « Jérusalem, Jérusalem ! nous irons à Jérusalem. » Enfin, lorsque le moment de sa mort approcha, il reprit toute sa connoissance. Il se fit mettre sur un petit lit de cendre : les bras croisés sur la poitrine, les yeux levés au ciel, il rendit l’esprit sur les trois heures après-midi, le lundi 25 août 1270. On remarqua avec surprise que la mort n’avoit mis aucun désordre dans ses traits ; sa bouche