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NOTICE

pliers, du beau vers par lequel il peint la fin de leur supplice :

Mais il n’étoit plus temps, les chants avoient cessé.

Dans une autre occasion, n’ayant auprès de lui que son cousin, le comte de Soissons, attaqué sur un pont par une multitude d’ennemis, n’espérant point de secours, criblé de traits, brûlé par le feu grégeois, il s’entretient gaiement avec son jeune ami, et se flatte de l’espoir qu’ils pourront encore raconter les désastres de cette journée en chambre devant les dames.

Ce mélange d’enjouement, de patience et de résignation, donne à la partie des Mémoires qui concerne la croisade un attrait qu’on chercheroit vainement dans tout autre ouvrage de ce genre, parce qu’il tient au caractère particulier de l’auteur encore plus qu’à son talent ; mais ce qui rend cet ouvrage l’un des monumens historiques les plus précieux, c’est qu’on peut y suivre saint Louis dans tous les détails de sa vie privée. On l’y voit converser avec un ami pour lequel il n’a rien de caché ; on remarque l’élévation de ses sentimens, la profondeur de sa politique, la justesse de son esprit, et la bonté de son cœur. On entre dans son intérieur, et l’on apprend comment il vivoit avec sa mère, avec son épouse, avec ses enfans. Ses œuvres de charité attendrissent, et les innocentes distractions qu’il se permet font une impression pleine de calme et de douceur.

Joinville composa ses Mémoires dans un âge très-avancé, à la sollicitation de Jeanne de Navarre,