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de saint loys.

mere, qui lui avoit dit que quant il voudroit dire quelque parolle, qu’il le fist ainsi, et qu’il invocast le nom de Dieu et l’aide du saint Esperit. Et furent telles les parolles du Roy : « Seigneurs, je vous remercie, ceulx qui m’avez conseillé de m’en aller en France : et pareillement foyz-je ceulx qui m’ont conseillé que je demourasse en ce païs. Mais je me suis depuis avisé, que quant je demourray, que mon royaume n’en sera jà plustoust pour ce en péril ; car madame la Royne ma mere a assez gens pour le deffendre. Et ay aussi esgard au dict des chevaliers de ce païs, qui disent que si je m’envois, que le royaume de Jérusalem sera perdu, par ce qu’il ne demourera nully aprés moy. Pourtant ay-je regardé que je suis cy venu pour garder le royaume de Jérusalem que j’ay conquis, et non pas pour le laisser perdre. Ainsi, Seigneurs, je vous dy, et à tous les autres, qui vouldront demourer avecques moy, que le diez hardiement : et vous promets que je vous donneray tant, que la couppe[1] ne sera pas mienne, mais vostre. Ceulx qui ne vouldront demourer, de par Dieu soit.» Aprés ces parolles, plusieurs en y eut d’esbahiz, et commencèrent à pleurer à chauldes larmes.

Après que le Roy eut declairé sa volenté, et que s’entencion estoit de demourer là, il en laissa venir en France ses freres. Mais je ne sçay pas bien si ce fut à leurs requestes, ou par la volenté du Roy, et fut ou temps d’environ la saint Jehan Baptiste. Et tantoust aprés que ses frères furent partiz d’avec lui pour leur en venir en France, ung peu aprés le Roy

  1. Couppe, lisez coulpe : faute.