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TABLEAU

en vain. Ne pouvant les effrayer, il prit le parti de les séduire : plusieurs bénéfices furent donnés à leurs parens et à leurs amis : il leur accorda les dispenses et les indulgences dont ils eurent besoin : par ce moyen, il refroidit insensiblement leur ardeur ; et cette association, qui pouvoit lui faire tant de mal, n’eut aucune suite.

Cependant le Roi, non par crainte des reproches du Pape, mais par le désir de remplir un vœu fait au ciel, se préparoit sérieusement à la croisade. Odon de Châteauroux, cardinal-évêque de Tusculum, autrefois chancelier de l’église de Paris, actuellement légat, vint la prêcher. Une foule immense se précipitoit sur ses pas : il suffisoit qu’un Roi chéri fût à la tête de cette noble entreprise, pour que tous les Français se disputassent l’honneur de le suivre.

Ce fut alors que la reine Blanche, qui toujours avoit désapprouvé ce dessein, tenta sur son fils un dernier effort pour le lui faire abandonner. Si cette princesse avoit eu, comme l’ont dit mal-à-propos quelques historiens, une ambition insatiable et la passion de gouverner seule, certainement elle n’eût pas détourné Louis, qui, depuis quelques années, ne suivoit pas toujours ses avis, d’une expédition lointaine qui devoit la rendre pendant long-temps la maîtresse absolue de la France. Sa véritable passion étoit, comme je l’ai montré, son amour pour son fils. Accompagnée de Guillaume, évêque de Paris, qui partageoit ses craintes, elle alla trouver le Roi.

Ce prélat fit d’abord observer à Louis qu’il avoit fait ce vœu précipitamment, sans consulter personne, dans le délire de la fièvre, et qu’un tel vœu n’enga-