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SUR L’HISTOIRE DE DU GUESCLIN.

alla d’Avignon à Toulouse pour y voir le duc d’Anjou, et que ce prince décida les grandes compagnies à aller en Arragon. Cette relation s’accorde avec ce que dit Du Tillet ; mais elle est en contradiction avec un autre passage des Mémoires, qui porte que Du Guesclin proposa au Roi de conduire les grandes compagnies en Castille pour secourir Henri Transtamare, et pour venger la mort de Blanche. D’un autre côté, dom Vaissette prouve que cette prétendue visite au duc d’Anjou est impossible, parce que ce prince n’étoit point à Toulouse à l’époque où l’on suppose que Du Guesclin alla l’y trouver avec les chefs des grandes compagnies ; et sa preuve est sans réplique, puisqu’il cite des lettres écrites par le duc à la même époque, et datées d’une ville fort éloignée. Nous ne nous arrêterons pas à une méprise de l’auteur des Mémoires, qui nomme le royaume d’Arragon, en voulant parler du royaume de Castille.

À défaut de documens précis et authentiques, on ne peut former que de simples conjectures sur le prétexte dont on se servit pour faire partir les grandes compagnies. Peut-être avoit-on promis au Pape qu’elles iroient combattre les Sarrasins après avoir établi dom Henri sur le trône de Castille ; peut-être Transtamare espéroit-il les engager plus facilement à embrasser sa querelle, lorsqu’une fois elles seroient en marche ; peut-être, en parlant d’une croisade, avoit-on voulu déguiser le véritable but de l’expédition. Mais quelle que soit l’opinion qu’on adopte, il faut reconnoître l’habileté de Charles V, qui se fit aider par le Pape et par Henri Transtamare à débarrasser ses provinces de brigands contre lesquels toutes les