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SUR DU GUESCLIN.

Quand il eut achevé ces paroles, il poussa son cheval avec beaucoup de roideur contre Pierre, tenant l’épée haute sur luy. Ces deux Rois se chamaillerent longtemps avec une égale furie, sans remporter aucun avantage l’un sur l’autre, car leurs armûres étoient si épaisses qu’ils ne les pouvoient entamer. Mais à la fin Henry fit de si grands efforts contre son adversaire, qu’il luy fît vuider la selle et l’abbattit à terre. Il alloit achever en luy perçant les flancs de sa lance, mais les sarrazins parèrent le coup, et s’assemblerent en foule en si grand nombre autour de luy, qu’ils eurent non seulement le loisir de le remonter, mais encore d’envelopper Henry de tous côtez, qui se défendant contr’eux tous et ne voulant pas reculer, crioit à son enseigne et à ses gens. Le bruit de sa voix les fit courir à luy d’une grande force. Le combat se renouvella donc avec plus de chaleur qu’auparavant. Les deux princes se rapprocherent avec un grand acharnement l’un sur l’autre. Ils étoient tous deux de fort rudes joüeurs. Pierre avoit une épée dans sa main plus trenchante et plus affilée qu’un rasoir, dont il voulut atteindre Henry ; mais le coup porta sur la tête de son cheval avec tant de vigueur et de force que non seulement il la trencha, mais il abbattit en même temps et le cheval et l’écuyer. Henry, qui n’avoit aucune blessûre, n’eut pas beaucoup de peine à se relever, et ses gens aussitôt luy presenterent une autre monture. Quand il fut remis à cheval, il rallia touttes ses troupes et les mena contre celles de Pierre, qui déjà touttes fatiguées d’un si long combat, ne purent soutenir davantage le choc des chrétiens, qui se tenoient si serrez, qu’il étoit tout à fait impossible de