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SUR DU GUESCLIN.

roit faire luy même en un an tout entier. Il l’avertit qu’il étoit necessaire qu’il fît diligence, parce que Robert Knole marchoit droit à Paris à la tête de vingt mille Anglois, ayant déjà passé la riviere de Seine au dessus de Troyes, et que le Roy l’attendoit pour luy donner l’épée de connétable, sçachant qu’elle ne pouvoit tomber en de meilleures mains qu’en les siennes. Bertrand ne s’entêta point de touttes ces louanges, mais tâcha de soutenir de son mieux la reputation qu’il avoit acquise ; et prenant congé du Duc, avec le maréchal d’Andreghem, il alla coucher à Pierregort[1], où il trouva Galleran, frère du comte de Jonas, qui luy fit un fort obligeant accuëil et le regala fort magnifiquement.

Aussitôt qu’il se fut levé de table, comme il n’avoit dans l’esprit que la guerre qu’il alloit entreprendre contre les Anglois, pour purger la France de ces dangereux ennemis, il s’avisa de monter au haut d’un donjon pour découvrir le clocher d’une abbaye que les Anglois avoient fortifiée. Le soleil qu’il faisoit, luy fit reconnoître leurs enseignes, où les leopards étoient semez d’or, et qui voltigeoient autour de ce clocher. Il fut fort étonné d’apprendre que les Anglois étoient si voisins du lieu où il avoit couché, et qu’ils étoient si bien retranchez dans cette abbaye, que depuis un an tout entier, on n’avoit pas pu les en dénicher. Il

  1. C’est-à-dire qu’il entra dans le Périgord. Le comte de Pérgord, que l’auteur des Mémoires appelle Jonas, vint au devant de Du Guesclin accompagné des sires de Mucidan, d’Aubeterre et d’autres seigneurs ses vassaux. Il avoit donné les ordres nécessaires à son frere Gallerand pour qu’on reçut dans la ville de Périgueux Du Guesclin et son armée. (Du Chastelet, p. 184.)