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[1649] MÉMOIRES

des députés qui sont attachés à elle ne veuillent pas suivre notre mouvement et refusent de courre notre fortune, nous ne trouverons pas moins notre avantage d’un autre sens : nous demeurerons avec le corps du parlement, dont les autres seront les déserteurs : nous en serons encore plus les maîtres. Voilà mon avis, que je m’offre de signer et de proposer au parlement, pourvu que vous ne laissiez point échapper la conjoncture dans laquelle seule il est bon. Car s’il arrivoit du changement du côté de M. de Turenne avant que je le lui eusse porté, je combattrois ce sentiment avec autant d’ardeur que je le propose. »

Madame de Bouillon, qui m’avoit trouvé jusque là trop modéré à son gré, fut surprise au dernier point de cette proposition, qui lui parut bonne parce qu’elle lui parut grande. Monsieur son mari me dit : « Il n’y a rien de plus beau que ce que vous proposez : il est possible, mais il est pernicieux pour tous les particuliers. L’Espagne nous promettra tout mais elle ne nous tiendra rien dès que nous lui aurons promis de ne travailler avec la cour qu’à la paix générale. Cette paix est son unique vue, et elle nous abandonnera toutes les fois qu’elle la pourra avoir ; et si nous faisons tout d’un coup ce grand effet que vous proposez, elle la pourra avoir infailliblement en quinze jours, parce qu’il sera impossible à la France de ne la pas faire même avec précipitation. Ce qui sera d’autant plus facile que je sais de science certaine que les Espagnols la veulent en toutes manières ; et même avec des conditions si peu avantageuses pour eux que