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[1649] MÉMOIRES

seroit nécessaire, toute créance au mauvais usage que l’on en pourroit faire du côté des Espagnols et du côté de la cour. Tout le monde sortit content de cette conférence, qui ne dura pas plus d’une heure et demie. M. le prince de Conti nous assura même que M. de Longueville l’agréoit au dernier point. Je retournai avec M. de Bouillon chez lui, et je trouvai les envoyés d’Espagne qui l’y attendoient. J’aperçus aisément, et à leurs manières et à leurs paroles, que M. de Bouillon leur avoit fait valoir et pour lui et pour moi la résolution que j’avois prise de ne me pas accommoder : aussi me firent-ils toutes les honnêtetés et toutes les offres imaginables. Nous convînmes de tous nos faits ce qui fut bien aisé, parce qu’ils approuvoient tout ce que M. de Bouillon proposoit. Il leur fit un pont d’or pour retirer leurs troupes avec bienséance, et sans qu’il parût qu’ils le fissent par nécessité. Il leur fit goûter tout ce que les occasions lui pourroient inspirer de leur proposer ; il prit vingt dates différentes et quelquefois même contraires, pour les pouvoir appliquer dans la suite comme il le jugeroit à propos. Je lui dis aussitôt qu’ils furent sortis, que je n’avois jamais vu personne qui fût si éloquent que lui pour persuader aux gens que les fièvres quartes leur étoient bonnes. « Le malheur est, me répondit-il, qu’il faut pour cette fois que je me le persuade aussi à moi-même. »

Comme je fus retourné chez moi je trouvai Varicarville qui venoit de Rouen de la part de M. de Longueville. Je crois être obligé de vous faire excuse ici de ce que, vous rendant compte de la guerre civile, je n’ai encore touché que légèrement un des princi-