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[1650] MÉMOIRES

très-humbles remontrances au Roi pour les en tirer, et pour les mettre en lieu où il n’y eût au moins rien à craindre pour leur santé. Je ne crus pas devoir nommer le Mazarin, afin de lui donner lieu à lui-même et au premier président de croire que ce ménagement pourroit être l’effet de quelque arrière-pensée que j’avois peut-être de me raccommoder avec lui plus facilement, après avoir ameuté et échauffé contre lui le parti de messieurs les princes, par une dernière déclaration qui, n’étant point pour la liberté, ne m’engageoit à rien dans les suites. Je communiquai cette pensée à madame de Lesdiguières, à madame la palatine, à madame de Chevreuse, à Viole, à Arnauld, à Croissy, au président de Bellièvre et à Caumartin. Il n’y eut que le dernier qui l’approuva, tout le monde disant qu’il falloit laisser remettre les esprits, qui ne se fussent jamais remis. Je l’emportai enfin par mon opiniâtreté ; mais je connus que si je ne réussissois pas, je serois désavoué par quelqu’un et blâmé par tous. Le coup étoit si nécessaire, que je crus en devoir prendre le hasard.

Le 20, je le pris : je parlai comme je viens de vous le dire. Tout le monde reprit cœur ; on conclut que tout n’étoit pas perdu. Le premier président donna dans ce dont je m’étois flatté, et dit au président Le Coigneux, au lever de l’assemblée, que mon avis avoit été fort artificieux ; mais qu’on voyoit au travers mon animosité contre les princes. Le président de Mesmes, seul et unique, ne donna pas dans le panneau. Il jugea que je m’étois raccommodé avec messieurs les princes, et il s’en affligea à un point qu’il y a des gens qui ont cru que sa douleur contribua à sa mort,