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DU CARDINAL DE RETZ. [1651]

en la manière la plus respectueuse qu’il me fut possible. L’on n’écrivit plus ni de part ni d’autre, et les deux Frondes ne s’égayèrent plus qu’aux dépens de Mazarin. Cette suspension de plumes ne se fit qu’après trois ou quatre mois de guerre bien échauffée ; mais j’ai cru qu’il seroit bon de réduire en ce petit endroit tout ce qu’il y a de ces combats et de cette trêve, pour n’être pas obligé de rebattre une matière qui ne se peut tout-à-fait omettre, et qui, à mon sens, ne mérite pas d’être beaucoup traitée. Il y a plus de soixante volumes de pièces composées dans le cours de la guerre civile : je crois pouvoir dire avec vérité qu’il n’y a pas cent feuillets qui méritent que l’on les lise.

Mon apparition au Palais plut si fort à la Reine, qu’elle écrivit dès l’après-dînée à madame la palatine de me témoigner la satisfaction qu’elle en avoit, et de me commander de sa part de me trouver dès le lendemain, entre onze heures et minuit, à la porte du cloître Saint-Honoré. Gabouri m’y vint prendre, et me mena dans le petit oratoire dont je vous ai déjà parlé, où je trouvai la Reine, qui ne se sentoit pas de la joie qu’elle avoit de voir sur le pavé un parti déclaré contre M. le prince. Elle m’avoua qu’elle ne l’avoit pas cru possible : du moins qu’il pût être en état de paroître sitôt. Elle me dit que M. Le Tellier ne se le pouvoit encore persuader ; elle ajouta que Servien soutenoit qu’il falloit que j’eusse un concert secret avec M. le prince. « Mais je ne m’étonne pas de Servien, ajouta-t-elle : c’est un traître qui s’entend avec lui, et qui est au désespoir de ce que vous lui faites tête. Mais à propos de cela, continua-t-elle,