Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/299

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
296
[1651] MÉMOIRES

donne de ma fidélité. La Reine, qui vit que, j’étois touché de ce qu’elle m’avoit dit, me fit mille honnêtetés : elle ajouta que je faisois injustice à Ondedei, et qu’elle vouloit que je le visse. Elle l’envoya quérir sur l’heure par Gabouri. Il vint habillé en vrai capitan de comédie, et chargé de plumes comme un mulet. Ses discours me parurent encore plus fous que sa mine : il ne parloit que de la facilité qu’il y avoit à terrasser M. le prince et à rétablir M. le cardinal. Il traita les instances que je faisois à la Reine, de permettre que Monsieur arrêtât M. le prince chez lui, de propositions ridicules et faites à dessein pour éluder les entreprises les plus faciles et les plus raisonnables que l’on pouvoit faire contre lui. Enfin tout ce que je vis ce soir-là de cet homme ne fut qu’un tissu d’impertinences et de fureur. Il se radoucit un peu sur la fin, à la très-humble supplication de la Reine, qui me paroissoit avoir une grande considération pour lui ; et madame la palatine me dit deux jours après que tout ce que j’avois vu de ce seigneur capitan n’étoit rien au prix de ce qui s’étoit passé le lendemain, et qu’il l’avoit traitée avec une insolence que l’on n’auroit pu s’imaginer. Elle fut un peu rabattue par le retour de Bertet, qui apportoit une grande dépêche du cardinal, qui blâmoit, même avec beaucoup d’aigreur, ceux qui avoient empêché la Reine de donner les mains à la proposition que je lui avois faite de faire arrêter M. le prince chez Monsieur, qui faisoit mes éloges sur cette proposition, qui traitoit Ondedei de fou, Le Tellier de poltron, Servien et Lyonne de dupes et qui contenoit même une instance très-pressante à la Reine de me faire expédier la nomina-