Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/334

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n’étoit d’aucune conséquence ; mais comme dans ces sortes de compagnies tout ce qui est de la forme touche les petits esprits et amuse même les plus raisonnables, on employa la matinée proprement à rien, et l’on remit l’assemblée au lundi. On pria, en attendant, Monsieur de s’entremettre pour l’accommodement. Il y eut dans cette séance beaucoup de chaleur entre M. le prince de Conti et M. le premier président. Celui-ci, qui n’étoit nullement content de M. le prince en son particulier, qu’il croyoit à mon sens, sans fondement, avoir obligé à plus de reconnoissance qu’il n’en avoit reçu celui-ci, dis-je, parla avec force de la retraite de Saint-Maur, et l’appela même un triste préalable de la guerre civile. Il ajouta deux ou trois paroles qui sembloient marquer les mouvemens passés, et causés par M. le prince de Condé. M. le prince de Conti le releva, même avec menaces, en lui disant qu’en tout autre endroit il lui apprendroit à se tenir dans le respect qui est dû aux princes du sang. Le premier président lui repartit hardiment qu’il ne craignoit rien, et qu’il avoit lieu de se plaindre lui-même qu’on osât l’interrompre dans sa place, où il représentoit la personne du Roi. On se leva de part et d’autre. Monsieur qui étoit très-aise de les voir commis les uns contre les autres, ne s’en mêla que quand il ne put plus s’en défendre ; et il dit à la fin aux uns et aux autres que tout le monde ne devoit s’appliquer qu’à radoucir les esprits. Monsieur, étant de retour chez lui, me mena dans le cabinet des livres, ferma la porte à verrou lui-même, jeta son chapeau sur la table, et me dit après d’un ton fort ému qu’avant que d’aller au Palais il n’avoit pas eu le temps de me dire