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soient des voyages continuels que M. de Mercœur avoit épousé depuis peu la Mancini ; que le maréchal d’Aumont[1] avoit ordre de tailler en pièces les régimens de Condé, de Conti et d’Enghien ; et que cet ordre étoit l’unique source qui les avoit empêchés de joindre l’armée du Roi.

Après que M. le prince eut cessé de parler M. le premier président dit qu’il avoit peine de le voir en cette place avant qu’il eut vu le Roi ; qu’il sembloit qu’il voulût élever autel contre autel. M. le prince s’aigrit à ce mot, et marqua, en s’en justifiant, que ceux qui parloient contre lui ne le faisoient que pour leurs intérêts particuliers. Le premier président repartit avec fierté qu’il n’en avoit jamais eu, mais qu’il n’avoit à rendre compte de ses actions qu’au Roi. Il exagéra ensuite le malheur où l’État se pouvoit trouver, par la division de la maison royale ; et puis se tournant vers M. le prince, il lui dit d’un air pathétique : « Est-il possible, monsieur, que vous n’ayez pas frémi vous-même d’une sainte horreur, en faisant réflexion sur ce qui se passa lundi dernier au Cours ? » M. le prince répondit qu’il en avoit été au désespoir, et que ce n’avoit été que par rencontre, dans laquelle il n’y avoit point eu de sa faute, parce qu’il n’avoit pas eu lieu de s’imaginer qu’il pût trouver le Roi au retour du bain, par un temps aussi froid qu’il faisoit. Il y eut à cet instant deux malentendus qui faillirent à faire changer la carte, et à la tourner contre moi. Monsieur, qui entendit un grand applaudissement à ce que M. le prince venoit de dire, parce que l’on

  1. Antoine d’Aumont de Rochebaron, duc et pair, et maréchal de France ; mort en 1669, en sa soixante-huitième année. (A. E.)