Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 45.djvu/407

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cette nature. Il m’étoit important de laisser à ma conduite tout l’air de défensive ; et je préférai cet avantage à celui d’une plus grande sûreté. Il faillit à m’en coûter cher : car, outre l’aventure de la porte, de laquelle je viens de vous entretenir, M. le prince, avec lequel j’ai parlé depuis fort souvent de cette journée, m’a dit qu’il avoit fait son compte sur cette circonstance et que si le bruit de la salle eût duré encore un moment, il me sautoit à la gorge pour me rendre responsable de tout le reste. Il le pouvoit, ayant assurément dans les lanternes beaucoup plus de gens que moi ; mais je suis persuadé que la suite eût été funeste aux deux partis, et qu’il eût eu lui-même grande peine de s’en tirer. Je reprends la suite de mon récit.

Aussitôt que je fus rentré dans la grand’chambre je dis à M. le premier président que je devois la vie à monsieur son fils, qui fit effectivement, en cette occasion, tout ce que la générosité la plus haute peut produire. Il étoit, en tout ce qui n’étoit pas contraire à la conduite et aux maximes de monsieur son père, attaché à M. le prince jusqu’à la passion. Il étoit persuadé, quoiqu’à tort, que j’avois eu part dans les séditions qui s’étoient vingt fois faites contre monsieur son père dans le cours du siège de Paris ; rien ne l’obligeoit de prendre davantage de part au péril où j’étois que la plupart de messieurs du parlement, qui demeuroient fort paisiblement dans leurs places. Il s’intéressa dans ma conservation jusqu’au point de s’être commis lui-même avec le parti, qui, au moins en cet endroit, étoit le plus fort. Il y a peu d’actions plus belles, et j’en conserverai avec tendresse la mé-