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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

Le lendemain au matin, M. le prince me fit l’honneur de me venir voir, et il continua à me parler du même air dont il m’avoit parlé la veille. Il reçut même avec plaisir la ballade en na, ne, ni, ne, nu, que Marigny lui porta alors, comme il descendoit l’escalier. Il m’écrivit le soir, sur les onze heures, un petit billet où il m’ordonnoit de me trouver, le lendemain matin à quatre heures, chez lui avec Noirmoutier. Nous l’éveillâmes, comme il nous l’avoit commandé. Il nous dit qu’il ne pouvoit se résoudre à faire la guerre civile que la Reine étoit si attachée au cardinal, qu’il n’y avoit que ce moyen de l’en séparer ; qu’il n’étoit pas de sa conscience et de son honneur de le prendre et qu’il étoit d’une naissance à laquelle la conduite du Balafré ne convenoit pas. Il ajouta qu’il n’oublieroit jamais l’obligation qu’il nous avoit ; qu’en s’accommodant, il nous accommoderoit aussi avec la cour, si nous le voulions sinon qu’il ne laisseroit pas si la cour nous attaquoit de prendre hautement notre protection. Nous lui répondîmes que nous n’avions prétendu, en lui offrant nos services, que l’honneur de le servir ; que nous serions au désespoir que notre considération eût arrêté un moment son accommodement avec la Reine ; que nous le suppliions de nous permettre de demeurer comme nous étions avec le cardinal ; et que cela n’empècheroit pas que nous ne demeurassions toujours dans les termes du respect et du service que nous avions voué à Son Altesse.

Les conditions de l’accommodement de M. le prince avec le cardinal n’ont jamais été publiques, parce qu’il ne s’en est su que ce qu’il a plu au cardinal, en ce temps-là, d’en jeter dans le monde. Ce qui en pa-