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[1649] MÉMOIRES

leur prêchois tous les jours qu’il falloit planer ; que les pointes étoient dangereuses ; que la patience avoit de plus grands effets que l’activité ; mais personne ne comprenoit cette vérité. L’impression que fit à ce propos dans les esprits un méchant mot de la princesse de Guémené est incroyable. Elle se ressouvint d’un vaudeville que l’on avoit fait autrefois sur un certain régiment de Brulon, où l’on disoit qu’il n’y avoit que deux dragons et quatre tambours. Comme elle haïssoit la Fronde pour plus d’une raison, elle me dit un jour chez elle, en me raillant, que nous n’étions plus que quatorze de notre parti, qu’elle compara ensuite au régiment de Brulon. Noirmoutier, qui étoit éveillé mais étourdi, et Laigues, qui étoit lourd mais présomptueux, furent touchés de cette raillerie, au point qu’ils murmuroient depuis le matin jusqu’au soir de ce que je ne m’accommodois pas, ou que je ne poussois pas les affaires à l’extrémité. Comme les chefs dans les factions n’en sont maîtres qu’autant qu’ils savent prévenir ou apaiser les murmures, il fallut en venir malgré moi à agir, quoiqu’il n’en fût pas encore temps ; et je trouvai, par bonne fortune, une matière qui eût rectifié l’imprudence, si ceux qui l’avoient causée ne l’eussent pas outrée.

Les rentes de l’hôtel-de-ville de Paris sont particulièrement le patrimoine de tous ceux qui n’ont que médiocrement de biens. Il est vrai qu’il y a de riches maisons qui y ont part, mais il est encore plus vrai qu’il semble que la Providence les ait plus destinées pour les pauvres que pour les riches : et cela, bien entendu et bien ménagé, pourroit être très-avantageux au