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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

J’observai dans cette conversation, qui quand la frayeur est venue jusqu’à certain point, elle produit les mêmes effets que la témérité. Longueil opina en cette occasion à investir le Palais-Royal. Après que je les eus laissés longtemps battre l’eau, pour laisser refroidir l’imagination, qui ne se rend jamais quand elle est échauffée, je leur proposai ce que j’avois résolu de leur dire avant que d’entrer chez Longueil. C’étoit que quand nous saurions le lendemain Monsieur et messieurs les princes au Palais, M. de Beaufort y allât, suivi de son écuyer ; que j’y entrasse en même temps par un autre degré, avec un simple aumônier ; que nous allassions prendre nos places et que je disse, en son nom et au mien, qu’ayant appris qu’on nous impliquoit dans la sédition, nous venions porter nos têtes au parlement pourêtre punis si nous étions coupables, ou pour demander justice contre les calomniateurs si nous nous trouvions innocens ; et que bien qu’en mon particulier je ne me tinsse pas justiciable de la compagnie, je renonçois pourtant à tous les priviléges, pour faire paroître mon innocence à un corps pour qui j’avois eu toute ma vie tant d’attachement et de vénération. « Je sais bien, messieurs, ajoutai-je, que le parti que je vous propose est un peu délicat, parce qu’on nous peut tuer au Palais ; mais si on manque de nous tuer, demain nous sommes maîtres du pavé : il est si beau à des particuliers de l’être dès le lendemain d’une accusation atroce, qu’il n’y a rien qu’il ne faille hasarder pour cela. Nous sommes innocens, la vérité est forte ; le peuple et nos amis ne sont abattus que parce que les circonstances malheureuses que le caprice, de la fortune a assem-