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DU CARDINAL DE RETZ. [1649]

de lui que des impertinences et des vanteries : comme, par exemple, qu’il me défendroit mieux que je ne me défendrois moi-même. Remarquez, s’il vous plaît, que bien qu’il jasât comme une linotte en particulier, il étoit toujours muet comme un poisson en public. Un chirurgien qu’il avoit à son service me pria d’aller attendre de ses nouvelles aux Carmélites qui sont tout proche, et me vint trouver un quart-d’heure après, pour me dire qu’aussitôt que nous étions sortis de la chambre de M. de Paris, il y étoit entré ; qu’il l’avoit loué de la fermeté avec laquelle il avoit résisté à ses neveux, qui le vouloient enterrer tout vif ; qu’ensuite il l’avoit exhorté à se lever en diligence pour aller au Palais : mais qu’aussitôt qu’il fut hors du lit, il lui avoit demandé d’un ton effaré comment il se portoit ? Que M. de Paris lui avoit répondu : « Je me porte bien. » À quoi il lui avoit reparti : « Cela ne se peut, vous avez trop mauvais visage ; » qu’après cela lui ayant tâté le pouls : « Vous avez, dit-il, la fièvre. » Sur cela M. de Paris s’étoit remis au lit, d’où tous les rois et toutes les reines ne le feroient pas sortir de quinze jours.

Nous allâmes au Palais, messieurs de Beaufort, de Brissac, de Retz et moi ; mais seuls et séparément. Messieurs les princes avoient près de mille gentilshommes avec eux, et on peut dire que toute la cour généralement s’y trouvoit. Comme j’étois en rochet et en camail, je passai la grand’salle le bonnet à la main ; et peu de gens me rendirent le salut, tant on étoit persuadé que j’étois perdu. Étant entré dans la grand’chambre avant que M. de Beaufort y fût arrivé, et ayant surpris par conséquent la compagnie, j’en-