Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/259

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des prétextes pour me rendre à la cour quand il lui conviendroit de le faire. Cette conduite est ordinaire à tous ceux qui ont plus d’artifice que de jugement ; mais elle n’est pas sûre à ceux qui ont plus d’impétuosité que de bonne foi. Je fis expliquer au maréchal ses intentions, en l’échauffant insensiblement : il se trahit soi-même en me les découvrant avec beaucoup d’imprudence, en présence de tout ce qui étoit avec nous dans la cour du château. Il me lut une lettre, par laquelle on lui écrivoit que l’on avoit donné avis à la cour que je promettois à Monsieur, qui étoit à Blois, de lui ménager M. le maréchal de La Meilleraye, et au point que je ne désespérois pas qu’il ne lui donnât retraite au Port-Louis. Je lui dis qu’il auroit toujours de ces tracasseries et que la cour, qui n’avoit songé qu’à apaiser Paris en m’éloignant, ne songeroit plus qu’à me tirer de ses mains par ses artifices. Il se tourna de mon côté comme un possédé, et il me dit d’une voix haute et animée : « En un mot, monsieur, je veux bien que vous sachiez que je ne ferai pas la guerre au Roi pour vous. Je tiendrai fidèlement ma parole ; mais aussi faudra-t-il que M. le président tienne celle qu’il a donnée au Roi. »

Cependant je me résolus de penser tout de bon à me sauver. M. le président, à qui la cour avoit déjà fait une manière de tentative, m’en pressoit ; et Montrésor me fit donner un petit billet par le moyen d’une dame de Nantes : « Vous devez être conduit à Brest dans la fin du mois, si vous ne vous sauvez. » La chose étoit très-difficile. Le préalable fut d’amuser le maréchal. Joly lui faisoit voir