Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/292

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M. de Guise, qui alloit à Naples sur l’armée navale de France, étoit mouillé à Porto-Condé avec six galères. Don Fernand Carillo, qui le sut deux jours après, me dit qu’il se fût moqué de ces six galères, parce que la sienne, qui avoit quatre cent cinquante hommes de chiourme, se fût aisément tirée d’affaire ; mais c’eût toujours été une affaire dont un homme qui se sauve de prison se passe encore plus facilement qu’un autre. La forteresse de Saint-Boniface, qui est en Corse et aux Gênois, tira quarante coups de canon en nous voyant et comme nous en passions trop loin pour en être salués, nous jugeâmes qu’elle nous faisoit quelque signal ; et il étoit vrai, car elle nous avertissoit qu’il y avoit des ennemis à Porto-Condé. Nous ne le prîmes pas ainsi, et nous crûmes qu’elle nous vouloit faire connoître qu’une petite frégate que nous voyions devant nous, au sortir du canal, étoit turque, comme elle en avoit le garbe. Il prit fantaisie à don Fernand de l’attaquer ; et il me dit qu’il me donneroit, si je lui permettois, le plaisir d’un combat qui ne dureroit qu’un quart d’heure. Il commanda que l’on donnât chasse à la frégate, qui paroissoit effectivement faire force de voiles pour s’enfuir. Le pilote, qui n’avoit d’attention qu’à cette frégate la manqua pour un banc de sable, qui ne paroissoit pas effectivement au dessus de l’eau mais qui est si connu qu’il est même marqué dans les cartes. La galère toucha. Comme il n’y a rien de si dangereux à la mer. tout le monde cria miséricorde ! Toute la chiourme se leva pour essayer de se déferrer, et de se jeter à la nage. Don Fernand Carillo, qui jouoit au piquet avec Joly, dans la chambre de poupe,