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grand duc me fit beaucoup d’offres, quoique le cardinal Mazarin l’eût fait menacer, de la part du Roi même, de rupture, s’il me donnoit passage par ses États. Rien ne pouvoit être plus ridicule ; et le grand duc lui répondit par son résident, qui me l’a confirmé depuis, qu’il le prioit de lui donner une invention de faire agréer au Pape et au sacré collége le refus qu’il m’en pourroit faire. Je ne pris de toutes les offres du grand duc que quatre mille écus, que je me crus nécessaires, parce que l’abbé Charier m’avoit dit qu’il n’y avoit encore aucune lettre de change pour moi à Rome. J’en fis ma promesse ; et je les dois encore au grand duc, qui a trouvé bon que je le misse le dernier dans le catalogue de mes créanciers, comme celui qui est assurément le moins pressé de son remboursement.

J’allai de l’Ambrosiane à Florence, où je demeura deux jours avec le cardinal Jean-Charles de Médicis et M. le prince Léopold son frère, qui a aussi depuis été cardinal. Ils me donnèrent une litière du grand duc, qui me porta jusqu’à Sienne, où je trouvai M. le prince Mathias, qui en étoit gouverneur. Il ne se peut rien ajouter aux honnêtetés que je reçus de cette maison, qui a véritablement hérité du titre de magnifique que quelques-uns d’eux ont porté, et que tous ont mérité. Je continuai mon chemin dans leurs litières, et avec leurs officiers ; et comme les pluies furent excessives en Italie, je faillis à me noyer auprès de Ponte-Cantine dans un torrent, dans lequel un coup de tonnerre qui effraya mes mules fit tomber la nuit ma litière. Le péril y fut certainement fort grand.

Comme je fus à une demi-journée de Rome, l’abbé