Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/388

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même temps une grande difficulté à se pouvoir séparer des intérêts ou plutôt de la conduite du premier, vu la situation des deux places, dont il est vrai que l’une n’est pas considérable sans l’autre. Enfin Malclerc, qui se réduisit à leur demander pour toutes grâces, en mon nom, de différer seulement leurs accommodemens jusqu’à la création du nouveau pape, ne tira de Noirmoutier que des railleries de ce qu’il s’étoit lui-même laissé surprendre aux fausses lueurs avec lesquelles j’affectois, disoit-il, d’amuser tout le monde touchant l’exaltation de Chigi ; et il revint à Paris où il apprit de M. de Châlons la création du pape Alexandre.

Mes amis, auxquels je l’avois mandée par Malclerc, en conçurent toutes les espérances que vous pouvez vous imaginer. Vous n’avez pas de peine à croire la douleur qu’eut M. de Noirmoutier de sa précipitation : il avoit conclu son accommodement avec le cardinal un peu après que Malclerc lui eut parlé, et il étoit venu à Paris pour le consommer. Il désira de voir Malclerc aussitôt qu’il eut appris que Chigi étoit effectivement pape. Il découvrit qu’il étoit encore à Paris, quoique mes amis, qui se défioient beaucoup de son secret et de sa bonne foi, lui eussent dit qu’il en étoit parti ; et il fit tant, qu’il le vit dans le faubourg Saint-Antoine. Il n’oublia rien pour excuser ou plutôt pour colorer la précipitation de son accommodement ; il ne cacha point la cruelle douleur qu’il avoit de n’avoir pas accordé le petit délai que l’on lui avoit demandé. Sa honte parut et sur son discours et sur son visage. Je ne fus plus cet homme malhonnête et tyran, qui vouloit sacrifier tous mes