Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 46.djvu/52

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qui craignoit tout, ne lui en fît donner beaucoup plus qu’il n’en falloit pour me perdre. Je lui dis que je le suppliois de me laisser faire, et qu’il verroit dans peu quel mépris l’on devoit faire de ces canailles achetées à prix d’argent. Il m’offrit ses gardes, mais d’une manière à me faire juger que je lui faisois fort bien ma cour de ne les pas accepter. Je descendis, quoique M. le maréchal d’Etampes se fût jeté à genoux devant moi pour m’en empêcher ; je descendis, dis-je, avec Château-Renaud et d’Hacqueville, qui étoient seuls avec moi, et j’allai droit à ces séditieux, en leur demandant qui étoit leur chef ? Un gueux d’entre eux, qui avoit une vieille plume jaune à son chapeau, me répondit insolemment : « C’est moi. » Je me tournai du côté de la rue de Tournon, en disant : « Gardes de la porte, que l’on me pende ce coquin à ces grilles. Il me fit une profonde révérence ; il me dit qu’il n’avoit pas cru manquer au respect qu’il me devoit ; qu’il étoit venu seulement avec ses camarades pour me dire que le bruit couroit que je voulois mener Monsieur à la cour, et le raccommoder avec le Mazarin ; qu’ils ne le croyoient pas ; qu’ils étoient mes serviteurs, et prêts à mourir pour mon service, pourvu que je leur promisse d’être toujours bon frondeur. Ils m’offrirent de m’accompagner ; mais je n’avois pas besoin de cette escorte pour le voyage que j’avois résolu, comme vous l’allez voir. Il n’étoit pas au moins fort long : car madame de La Vergne, mère de madame de La Fayette, et qui avoit épousé en secondes noces le chevalier de Sévigné, logeoit où loge présentement madame sa fille. Cette madame de La Vergne étoit honnête femme dans le fond, mais intéressée au der-