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qu’ils ne faisoient point en effet. Monsieur, qui étoit foible, craignoit de se brouiller avec le peuple, en réprimant avec trop de véhémence les criailleurs ; et M. le prince, qui étoit intrépide, ne faisoit pas assez de réflexion sur les mauvais et puissans effets que ces émotions faisoient à son égard dans les esprits de ceux qui en avoient peur.

Il faut que je me confesse en cet endroit, et que je vous avoue que comme j’avois intérêt à affoiblir le crédit de M. le prince dans le public, je n’oubliai, pour réussir, aucune des couleurs que je trouvai sur ce sujet assez abondamment dans les manières de beaucoup de gens de son parti. Jamais homme n’a été plus éloigné que M. le prince de ces sortes de moyens. Il n’y en a jamais eu un seul sur qui il fût plus aisé d’en jeter l’envie et les apparences. Pesch étoit tous les jours dans la cour de l’hôtel de Condé, et le commandeur de Saint-Simon[1] ne bougeoit de l’antichambre. Il faut que ce dernier se soit mêlé d’un étrange métier, puisque, nonobstant sa qualité, je n’ai pas honte de le confondre avec un misérable criailleur de la lie du peuple. Il est certain que je me servis utilement de ces deux noms contre les intérêts de M. le prince, qui dans la vérité n’avoit de tort à cet égard que celui de ne pas faire assez d’attention à leur sottise. J’ose dire, sans manquer au respect que je lui dois qu’il fut moins excusable en celle qu’il n’eut pas de s’opposer d’abord à de certaines libertés que des particuliers prirent dans tous les corps, de lui résister en face, et de l’attaquer même personnel-

  1. Louis de Saint-Simon, chevalier de Malte, commandeur et capitaine aux gardes ; mort en (A. E.)