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DE CONRART. [1652]

vins[1] y arrivèrent, ayant été mandés par M. d’Orléans, et ils trouvèrent toute la cour remplie de canailles qui crioient qu’il ne falloit point ôter le chapeau à ces mazarins ; qu’il falloit faire garde aux portes pour empêcher le Mazarin de revenir, et qu’ils la feroient en dépit d’eux et de tous les mazarins. Étant montés en haut pour parler à M. d’Orléans, qui les avoit mandés, ces mutins les suivirent, continuant leurs huées, et remplirent la salle, l’antichambre et la chambre de Son Altesse Royale, qui sortit plusieurs fois de son cabinet, regardant par une fenêtre dans la cour, où il y avoit encore un très-grand nombre de pareilles gens qui n’avoient pu monter. À peine y avoit-il une douzaine d’hommes vêtus de noir parmi tout ce grand nombre, et pas un n’avoit ni épée ni bâton. Il y en eut qui dirent que quelqu’un les avoit fait venir là pour assassiner le prévôt des marchands au sortir. M. d’Orléans ne leur commanda jamais de se retirer, ni ne leur demanda même ce qu’ils vouloient ; on ne les avoit empêchés ni d’entrer ni de monter. Quelques-uns mirent les mains sur le prévôt des marchands pour le mettre en pièces ; il fallut que Son Altesse Royale sortît de son cabinet pour le leur arracher ; il leur dit qu’il ne vouloit point qu’on lui fit du mal dans sa maison. Parmi leurs crieries, ils disoient qu’il seroit fête le lendemain[2], et qu’il falloit piller toutes les maisons des mazarins, et particulièrement celle du prévôt des marchands. Au sortir du palais d’Orléans, son carrosse étant poursuivi par quelque nombre de

  1. Guillois et Le Vieux. (Note de Conrart.)
  2. Fête le lendemain : Fête de saint Jacques et de saint Philippe, qui étoit alors un jour férié, comme toutes les fêtes d’apôtre.