Page:Petitot - Collection complète des mémoires relatifs à l’histoire de France, 2e série, tome 48.djvu/51

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
49
DE CONRART. [1652]

de sorte qu’il lui répondit seulement qu’il ne savoit pas pourquoi il lui parloit ainsi, et qu’il n’avoit nulle intelligence ni nulle liaison avec le cardinal. L’avocat poursuivit ; et élevant la voix, il dit qu’il lui falloit donner des coups de bâton et le jeter dans la rivière, et qu’il étoit retz et mazarin. À l’instant plusieurs séditieux se jetèrent sur lui, et le battirent extrêmement. Soit pour cela ou pour autre chose, la populace s’émut, il y eut plusieurs épées tirées ; et les archers qui avoient accompagné le corps de ville ayant voulu faire cesser le tumulte, furent poussés par la canaille, qui étoit en très-grand nombre, et contraints de céder.

Durant tous ces jours-là, le duc d’Orléans ne paroissoit point, soit dans la cour ou dans le jardin de son palais, qu’il ne fût précédé, entouré et suivi d’une infinité de coquins mal faits et vêtus de gris, comme apprentis et compagnons de métier, et filous, qui crioient toujours : « Point de Mazarin ! Monseigneur, nous sommes prêts de mourir pour vous, et d’aller chasser ce méchant, ce traître. » Et même, le jeudi 2, M. d’Orléans entrant dans le Cours, les laquais commencèrent à crier Point de Mazarin ! et de suite les dames les plus galantes crièrent la même chose de leur carrosse, en passant devant celui de Son Altesse Royale.

Le duc de Beaufort, qui ne bougeoit du palais d’Orléans, étant un jour dans le jardin avec Son Altesse Royale, M. le prince et tout ce qu’il y avoit de noblesse à Paris, une pauvre femme l’aborda, et lui demanda long-temps assistance dans ses misères, qu’elle lui représentoit les plus grandes qu’elle pouvoit, et