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des dènè tchippewayans

ceinte, et repeuplèrent cette terre sortie fraîchement du sein des eaux. Alors tous les animaux s’écrièrent :

— Maintenant tuons, tuons le corbeau, cet oiseau malfaisant et inutile. Il est notre ennemi.

Mais lui :

— Par pitié, laissez-moi la vie, s’écria-t-il, et désormais je me contenterai du charnier.

— Eh bien ! puisque tu veux vivre, lui dit-on, donne-nous donc de la viande.

Ce qui se disait là était nécessaire ; car depuis que le corbeau avait enfermé les ruminants, tous les animaux qui se nourrissent d’herbe étaient invulnérables, ils étaient tous revêtus d’os et de corne comme d’une cuirasse, de sorte que nos flèches s’émoussaient sur leur corps. Comme on ne pouvait les tuer, la vie devenait impossible.

Le corbeau ayant donc demandé la vie à la condition qu’il donnerait aux hommes de la viande, il s’en alla et se percha au sommet de la montagne, où il se mit à ronger, à ronger des os. Il les tailla, les façonna, les découpa en forme de côtes, qu’il lança comme des flèches parmi les animaux ruminants. Tous ceux qu’il atteignit eurent une charpente formée de côtes et de chair, et devinrent vulnérables et comestibles. Quant aux autres, ils demeurèrent à l’abri de nos flèches, et on ne put les tuer ni les manger.